Développer des relations harmonieuses

Nous avons souvent entendu la phrase de Sartre « l’enfer c’est les autres », l’enfer fait de souffrance, de conflits, d’incompréhensions. Nous avons également pu faire des rencontres qui rappellent cette phrase.
Mais d’où vient l’enfer ? De moi ? De l’autre ? De la relation ?

Répondre à ces questions est nécessaire pour développer des relations harmonieuses car comme dit Krishnamurti : « quand on comprend vraiment en profondeur les causes d’une souffrance, alors de cette prise de conscience de cette vision pénétrante, de cette observation, l’ordre surgit spontanément ».
Découvrons ensemble les causes de la souffrance dans une relation pour révéler la possible harmonie.
Si nous observons un conflit que nous avons eu avec quelqu’un, qu’est ce qui s’est passé ? L’autre m’a agacé, il m’a blessé. La souffrance est apparue en nous. Pourquoi ? Posons nous la question pour comprendre les causes de cette souffrance et pour éviter de réagir contre l’autre et entrer en conflit. Nous mettons souvent toute notre attention sur l’autre et sur ce qu’il fait. Ici, regardons aussi ce qui se passe en nous puisque la souffrance est en nous.
L’autre s’autorise à arriver en retard sans complexe alors que je fais toujours attention à ne pas l’être. II ose mettre en place des projets et pas moi. Il est très organisé alors que moi, après tant d’effort, je ne le suis pas. A ce moment là, qu’est-ce que l’autre me renvoie ? Qu’est-ce qu’il me montre ? Il incarne quelque chose que je réprime.
L’autre peut m’agacer aussi parce qu’il me ressemble, moi qui pensais être unique, différent, spécial.
La relation que je vis actuellement ne fait-elle pas écho à un souvenir, à une autre histoire que j’ai déjà vécue et que je n’ai pas comprise ? L’autre va appuyer sur la même blessure et la souffrance va apparaitre.
La souffrance peut donc survenir dans une relation soit parce que l’autre incarne quelque chose que je réprime soit parce qu’il me ressemble soit parce que notre relation fait écho à une histoire du passé.
Regardons de plus prêt ces trois causes de souffrance : les deux premières causes proviennent d’une comparaison à l’autre. Or, la comparaison est destructrice, source de conflit. Toute l’histoire le prouve : la guerre des religions, la guerre des races, … La nature peut nous aider ici. Une vague ne s’énerve pas contre la vague d’à côté parce qu’elle est plus rapide ou plus douce. Elle va et c’est tout. Chaque vague a sa propre responsabilité. Chacun a sa responsabilité. L’autre n’est pas responsable de ce que je réprime en moi. Il n’est pas non plus responsable de me ressembler.
La troisième cause possible de notre souffrance est issue de nos mémoires, de nos souvenirs : peur d’être quitté, peur de la trahison, peur de ne pas être compris, … Nous prenons nos veilles expériences, considérées comme bonnes ou mauvaises et nous les emmenons partout avec nous. Nous réagissons dès que l’expérience vécue dans le passé est réactivée. Nous ne vivons alors pas la relation présente à nous à l’instant mais celle du passé qui se rejoue inéluctablement.
Que pouvons nous retenir de nos observations ? Que pouvons nous répondre à Sartre ? L’enfer provient de pensées à l’intérieur de nous : celles qui comparent, celles qui jugent, celles qui sont le fruit de nos mémoires, toutes révélées par l’autre. Sartre n’a ni raison, ni tort ! L’autre révèle une facette de moi-même que je n’accepte pas.

Découvrons ce que nous pouvons faire à partir d’aujourd’hui pour développer des relations harmonieuses.
Avec notre découverte des causes engendrant la souffrance dans nos relations, essayons de porter notre attention non pas sur l’autre, mais sur nous et posons nous deux questions.
La première : en quoi ça me concerne que l’autre agisse comme ci comme ça ? Qu’est-ce qui me met en souffrance ? Et observons ce qui se passe en nous : soyons attentifs aux pensées et aux émotions qui arrivent, regardons les, qu’elles soient sombres ou lumineuses, ne portons aucun jugement dessus et laissons les passer. Cette attention est un premier pas vers des relations harmonieuses avec les autres et surtout avec moi-même, le plus important puisque je suis la seule personne que j’aurai toujours avec moi. Tous les autres finiront par me quitter d’une façon ou d’une autre.
La seconde question à nous poser est : qu’est ce que ça vient réveiller dans mon histoire ? Plus nous explorons les personnages de l’ombre en nous, plus nous sommes en paix. Imaginez que nous sommes détachés et que nous prenons un nouveau départ avec chaque nouvelle relation, à chaque nouvelle journée. Quel cadeau nous offrons alors à nous-même et à l’autre ! Le passé n’a plus de réalité à partir du moment où nous pratiquons la concentration sur l’instant présent, où a lieu tout changement. Abandonner nos vieilles habitudes et nous détacher de nos anciennes façons de vivre procurent la possibilité de découvrir des relations harmonieuses (avec moi puis avec les autres).
En attendant de pouvoir répondre à ces questions, demandant du temps et des efforts, et parfois l’intervention d’une aide extérieure, suivons Spinoza en ne combattant pas nos émotions mais en :
• Repérant l’émotion (joie, colère, tristesse, peur ou surprise) qui surgit en présence de l’autre, sans l’associer à l’autre.
• Accueillant l’émotion dans l’instant, sans interpréter le comportement de l’autre (un accord toltèque : « ne faites pas de supposition »).
Et j’ajouterai :
• Osons exprimer nos émotions à cet instant de la relation, sans s’incriminer et sans rendre responsable l’autre de notre mal être ou de notre joie. Thich Nhat Hanh propose de dire la vérité, de ne pas exagérer en disant ce qui est, de parler dans la paix et d’être cohérent en disant la même chose à l’intérieur de nous et à l’extérieur. Si c’est trop difficile de dire à l’autre, nous pouvons dans un premier temps nous le dire à nous-même. La communication sera déjà restaurée avec nous-même. Puis petit à petit, nous pourrons exprimer ce qui se passe à l’intérieur de nous à l’extérieur. Pour nous exprimer vers l’extérieur, Jacques Salomé préconise l’emploi du « je » qui invite à se recentrer et qui invite l’autre à exprimer ce qu’il ressent plutôt que de penser à sa place, ce qui peut vite être insupportable. En procédant ainsi, l’autre pourra m’apporter quelques réponses quant à son comportement et effacera toute interprétation possible. L’autre pourra également m’aider dans la découverte de ce qui me touche. Il est possible aussi que l’autre n’écoutera pas, et qu’il recommencera. Nous pouvons alors nous en détourner, dans la paix, et aller vers des personnes attentives. Nous serons sûrement déçus, bien sûr. Mais nous ne sommes pas responsables des réactions de l’autre. Nous ne sommes responsables que de nous-même : nous sommes responsables des mots employés en ayant une parole impeccable (un accord toltèque), nous sommes responsables de nos comportements et c’est déjà beaucoup !
Dans chaque relation, qu’elle soit heureuse ou malheureuse, au retour de chez l’autre, nous aurons appris sur nous.

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